Le Mercure de mai 1740, en annonçant la mise en vente de l'Enfance, fait savoir que Moyreau grave actuellement la suite des Quatre âges, d'après quatre tableaux de Raoux qui se trouvent dans le cabinet du Chevalier d'Orléans, grand prieur de France. La Jeunesse parut en août 1740; l'Age viril, en mai 1743 ; et la Vieillesse, en mai 1744.
Si l'on en croyait Bellier de La Chavignerie, ce serait quand Raoux, grand prix de peinture en 1704 et parti quelq1.1e temps après pour l'Italie, fut rentré en France en 1714, que le grand-prieur de Vendôme lui aurait commandé ces tableaux. Ce renseignement est déjà démenti par le fait que, sur l'une des compositions gravées, la Vieillesse, on lit, dans un cartouche, la mention: Par Raoux, a Rome, 1714. D'autre part, d' Argenville dit que ces quatre « tableaux de chevalet » furent commandés à Raoux pendant son séjour en Italie par le grand-prieur de Vendôme qui l'y rencontra et que deux seulement des peintures étaient achevées quand l'artiste rentra en France en 1714: le caractère italien de ces compositions est d'ailleurs flagrant.
Quoi qu'il en soit, un long espace de temps une trentaine d'années sépare la date d'exécution de ces peintures de celle de leur traduction, et, si l'on n'était pas renseigné par les annonces du Mercure et par les livrets des Salons (les estampes de l'Enfance et de la Jeunesse ayant été exposées en 1740; celles de l'Age viril et de la Vieillesse, en 1745 ), on aurait peine à croire que cette traduction est de beaucoup postérieure à l'achèvement de l'entreprise de Jullienne et due à un artiste qui a maintes fois interprété Watteau. Tout, dans ces estampes, où des scènes gauchement composées sont gravées de la façon la plus lourde et la plus opaque, tout montre à quel point l'auteur des tableaux, -il fut pourtant l'un des premiers à représenter les Quatre âges par des personnages modernes et l'un des contemporains de Watteau, était encore étranger, même après son retour de Rome, aux innovations apportées par le maître des « fêtes galantes » dans la peinture de genre. C'est à ce point de vue, et, pour ainsi dire, comme documents de comparaison, que les Quatre âges de Moyreau d'après Raoux, ont, à nos yeux, un grand intérêt de curiosité.
