LAUNAY   Nicolas Delaunay, ou De
(1739-1792)

Voici le maître qui peut être considéré comme le graveur le plus représentatif de la deuxième moitié du siècle; moins discret que Cochin le père et sans doute moins habile à varier son métier selon les artistes qu'il interprétait, mais admirable de liberté, de légèreté et de fraîcheur, coloriste quand il le faut, luministe toujours, Nicolas de Launay était bien l'interprète idéal qu'on devait souhaiter à Baudouin, à Lavreince et à Fragonard, pour leurs charmantes compositions galantes ou familières.
Né à Paris en 1739, élève de L. Lempereur, N. de Launay, agréé seulement en 1777, ne fut reçu  académicien qu'en 1789, trois ans avant sa mort, survenue le 22 mars 1792.
Toutes ses grandes planches sont célèbres, et il faut se borner ici à ne citer que les principales: le  Carquois épuisé, les Soins tardifs, l'Épouse indiscrète, la Sentinelle en défaut, d'après Baudouin; le Billet doux, la Consolation de l'absence, l'Heureux moment), Qu'en dit l'abbé? d'après Lavreince; le Chiffre d'amour, le Serment d'amour , la Bonne mère, l'Éducation fait tout, le Petit Prédicateur, les Beignets, Dites donc: S'il vous plaît, les Hasards heureux de l'escarpolette, d'après Fragonard; le Petit jour, d'après Freudeberg; il a aussi gravé Le Prince et Aubry, et collaboré à tous les grands monuments typographiques de son temps, en interprétant à la perfection les vignettes des maîtres du genre, Eisen, Gravelot, Cochin le fils, Moreau le jeune, Marillier et bien d'autres.
C'est Nicolas de Launay qui forma son frère cadet Robert (I754-1814) et fit de lui un habile buriniste, auteur d'estampes estimées d'après Aubry (les Adieux à la nourrice), Borel, Fragonard, Greuze, Lavreince, Moreau le jeune (les Adieux, pour le Monument du Costume), de vignettes et de portraits.


 

Le Petit jour.

A Monsieur De Sandoz Rollin, Conseiller D'Ambassade De Sa Majesté le Roy dePrusse.
Gravé par Nicolas De Launay.
H. 0,352 x L. 0,249 (y compris l'encadrement).

Annoncée au Mercure du 1er janvier 1780 par N. de Launay lui-même, en même temps que la Bonne mère de Fragonard, sans détail ni prix, cette grande pièce est certainement la meilleure de toutes les estampes gravées d'après Freudeberg. A l'époque où elle parut, l'auteur du dessin original était, depuis sept ans, rentré en Suisse, son pays natal; mais, après son départ, on avait continué de graver celles de ses œuvres dont les originaux se trouvaient dans les collections parisiennes.
Cette belle planche est la dernière en date de ce qu'on pourrait appeler l' « œuvre parisien » de Freudeberg.

 


L'Heureux moment.   La Consolation de l'absence.
Gravé par N. DE LAUNAY.
Chaque pièce H. 0,353 x L. 0,250 (y compris l'encadrement).
E. Bocher, Lavreince, nos 28 et 14.

L'Heureux moment, gravé d'après une gouache, parut en 1777. Le Mercure de la deuxième quinzaine d'octobre l'annonce, au prix de 3 livres: « L'Heureux moment est pour un amant qui est aux pieds de sa maîtresse et qui semble lire son bonheur dans ses yeux. Cette composition est agréable et faite pour plaire ». D'après le Journal de Paris du 5 octobre, cette estampe est « dans le genre connu de M. Baudouin » et gravée « avec toute la gentillesse du sujet, s'il est permis de s'exprimer ainsi » ; le même journal ajoute qu'elle fait suite à celles déjà connues d'après lavreince et Baudouin, intitulées: Les Soins tardifs, le Carquois épuisé et la Complaisance maternelle, toutes pièces de même grandeur.
La Consolation de l'absence est aussi gravée d'après une gouache. L'estampe, exposée par N. de Launay au Salon de 1785, est annoncée au Mercure du 9 et au Journal de Paris du 12 juillet suivant : « ...Cette jolie estampe est la sixième de la suite déjà connue du même auteur entendez: du même graveur, sous le titre du Carquois épuisé, les Soins tardifs, l'Heureux moment, la Complaisance maternelle et le Petit jour, d'après MM. Baudouin, Lavreince et Freudeberg ».


Les Hasards heureux de l'escarpolette.
Gravé par Nicolas De Launay.
H. 0,515 x L. 0,425. 
Epreuve du 2e état avec le fleuron de Choffard, la lettre incomplète et « avec la faute » (les Hasards heureux de l'escarpolettes).

Belle et célèbre estampe, célèbre à tous égards, c'est-à-dire autant par ses qualités intrinsèques que par la réputation de la peinture originale, véritable « tableau de réception » de Fragonard dans l'art galant, comme l'a appelée M. P. de Nolhac.
La gravure n'a pas été annoncée au Mercure et, pour en déterminer approximativement la date, on est réduit à rappeler celle du tableau, dont Collé raconte l'histoire dans un passage de son Journal, bien souvent cité et d'ailleurs infiniment savoureux.

Le 2 octobre 1767, Collé rencontre Doyen, qui vient d'obtenir un succès marqué au Salon avec une peinture « dans le grand genre », destinée à Saint- Roch et représentant Sainte Geneviève des Ardents : « Croirait-on, me disait ce peintre, que peu de jours après l'exposition de mon tableau au Salon, un homme de la Cour m'a envoyé chercher pour m'en commander un dans le genre que je vais vous dire?
Ce seigneur était à sa petite maison avec sa maîtresse, lorsque je me présentai à lui pour savoir ce qu'il me voulait. Il m'accabla d'abord de politesses et d'éloges, et finit par m'avouer qu'il se mourait d'envie d'avoir, de ma façon, le tableau dont il allait me tracer l'idée.
« Je désirerais, continua-t-il, que vous peignissiez « madame (en me montrant sa maîtresse) sur une « escarpolette qu'un évêque mettrait en branle. Vous « me placerez de façon, moi, que je sois à portée de « voir les jambes de cette belle enfant, et mieux même, « si vous voulez égayer davantage votre tableau, etc. » J'avoue, me dit M. Doyen, que cette proposition à laquelle je n'aurais jamais dû m'attendre, vu la nature du tableau d'où il partait pour me la faire, me confondit et me pétrifia d'abord. Je me remis pourtant assez pour lui dire presque sur-le-champ : « Ah ! « monsieur, il faut ajouter au fond de l'idée de votre « tableau, en faisant voler en l'air les pantoufles de « madame, et que des amours les retiennent » .Mais comme j'étais bien éloigné de vouloir traiter un pareil sujet, si opposé au genre dans lequel je travaille, j'ai adressé ce seigneur à M. Fagonat (sic)] qui l'a entrepris et qui fait actuellement cet ouvrage singulier ».
En cet « homme de la cour », dont parle Doyen, on a proposé de voir Baillet de Saint- Julien, amateur et critique, le même pour qui Fragonard peignit la Main chaude et le Cheval fondu. Les Hasards heureux auraient donc été peints vers la fin de 1767, quelque six ans après que Frago fût rentré de son premier voyage d'Italie. Le tableau est actuellement dans la Galerie Wallace.
Le peintre n'a pas encore cette fougue et cette sûreté qu'il montrera par la suite. Sa facture est sage, appliquée, minutieuse, un peu trop peut-être, et la gravure traduit exactement tout cela. Mais elle a aussi toutes les qualités de l'original : la lumière, l'envolée, la grâce, l'esprit, le tact, en un mot tout ce qui sauve le sujet et fait de ce qui aurait pu être une lourde grivoiserie le plus exquis des badinages libertins.
La gravure daterait au plus tôt de 1768, elle figure dans une liste imprimée des estampes publiées par N. de Launay, avec le prix de 9 livres. Le joli fleuron de la dédicace à Fragonard est dû à Choffard ; sur la collaboration des graveurs ornemanistes aux estampes du XVIIIe siècle, voir ce qui a été dit à propos de le Lever et de la Toilette, d'après Baudouin .


 Les Beignets.  Dites donc: S'il vous plaît !
Gravé par Nicolas De Launay.
Dimensions respectives: H. 0,268 x L. 0,305; H. 0,270 x L. 0,306.
Pour la première de ces planches, nous reproduisons le 3e état;
à partir du 4e, le mot Baignets sera corrigé en Beignets. Portalis, nos 19 et 60.

N. de Launay a gravé délicieusement toute une série de scènes familiales de Fragonard. Voici deux des plus agréables et des plus réussies de ces estampes, dont on connaît l'heureuse présentation: un même encadrement architectonique, gracieusement décoré de guirlandes de fleurs et de fruits chaque fois renouvelées, laisse voir la composition par une ouverture ovale en largeur, lui donnant ainsi plus de profondeur ; la tablette inférieure porte le titre, gravé en caractères élégants et variés, de part et d'autre des armes de la personne de distinction à qui la pièce est dédiée.
Le Journal de Paris du 2 mai 1782, en annonçant les Beignets, note que cette estampe fait pendant à l' Heureuse fécondité et à le Bonheur du ménage, gravées, la première d'après Fragonard, la deuxième d'après Le Prince, et exposées, la première au Salon de 1777 , la deuxième à celui de 1779; et il ajoute: « Le graveur, M. de Launay, se propose d'en complet ter une suite de six estampes sous le même format. Celle que nous annonçons est d'un effet piquant et paraît rendre l'esprit du dessin original, ..».
Les trois autres estampes parurent, en effet, pendant les années qui suivirent, mais à d'assez longs intervalles: si l'on ignore la date de mise en vente de « Dites donc : S'il vous plait », estampe qui figura au Salon de 1783 avec les Beignets, on connaît celle des deux dernières de ces six pièces: le Petit prédicateur et l'Éducation fait tout, mises en vente ensemble en 1781 (Mercure du 5 mars). A cette époque elles sont comme le chant du cygne de N. de Launay, du genre de gravure qu'il représentait et de bien d'autres choses encore.


Le Chiffre d'amour.
Gravé par Nicolas De Launay.
H. 0,367 x L. 0,275 (y compris l'encadrement).
Portalis, n° 42.

La peinture, aujourd'hui dans la Galerie Wallace, est signée, mais non datée.
La gravure, exposée au Salon de 1787, est marquée 3 livres dans la liste des estampes de N. de Launay dont il a été question précédemment.
Elle représentera ici, mieux que toute autre, ce genre de poétiques compositions sur lesquelles Fragonard est revenu plusieurs fois avec une prédilection marquée: la Fontaine d'amour (I785), le Serment d'amour (1786), et d'autres encore. On y distinguera aussi l'évolution marquée par le graveur vers une manière moins libre que celle de ses reproductions les plus anciennes.

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DESPLACES  Louis Philippe
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DREVET  Pierre
DREVET  Pierre Imbert
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