DEMARTEAU    Gilles
(1722-1776)

On a pu, pendant un temps, voir en Gilles Demarteau l'inventeur, ou plutôt le rénovateur, car l'invention remonte plus haut que le XVllIe siècle, du procédé de gravure dit «en manière de crayon» aujourd'hui, l'examen des dates ne permet plus d'accepter cette opinion, Mais, si c'est à J. C. François, de Nancy, qu'il faut faire honneur de l'invention, il reste à Demarteau celui d'avoir su tirer du procédé le parti le meilleur et de l'avoir porté à sa perfection, C'est bien quelque chose.
Né à Liége le 19 janvier 1722, fils d'un graveur armurier, Demarteau vint de bonne heure en apprentissage à Paris et reçut la maîtrise en 1746. Agréé à l'Académie, le 26 avril 1766, reçu académicien le 2 septembre 1769, il mourut à Paris, le 31 juillet 1776, laissant à son neveu Gilles Antoine la très belle fortune qu'il avait amassée et le riche fonds de planches qu'il avait constitué, planches qui, toutes, étaient son oeuvre et l'oeuvre des vingt dernières années de sa vie.
Dès le temps où François présenta à l'Académie de peinture ses essais dé gravure en manière de crayon (26 novembre 1757), Demarteau était en relations avec Cochin, qu'il avait gravé en 1755 et grava par la suite à diverses reprises (en particulier, le fameux Lycurgue blessé, son morceau de réception); or, dans la lettre à Marigny où il expose le sentiment, de l' Académie sur 1'invention de François, Cochin ne fait à Demarteau, et sans le nommer, qu'une allusion fort discrète; nul doute que s'il avait cru à l'antériorité des titres de son graveur, il n'eût profité de l'occasion pour rétablir la vérité. François fut donc pensionné par le Roi, et c'est seulement après sa mort (1769) que sa pension fut attribuée à Demarteau.
Par contre, Demarteau a «réalisé» plus vite que François. Beaucoup mieux doué que lui comme dessinateur et comme graveur, il a produit quantité de charmantes et parfaites petites estampes, donnant réellement l'illusion des dessins au crayon de Watteau, de J. B. Huet, de
C. Vanloo, de Pierre, de Le Prince, de Cochin, de Boucher surtout qu'il a copieusement reproduit; ces estampes, très recherchées aujourd'hui, imitent ordinairement les sanguines, et quelquefois les dessins aux deux ou aux trois crayons.
L. de Leymarie, dans son Catalogue de Demarteau l'aîné (I896), relève 729 pièces à l'actif de l'artiste, sans compter les cahiers ou recueils, lesquels sont au nombre de 86, certains, contenant jusqu'à 69 pièces.


Carle Vanloo.
Carle Vanloo...
Dessiné par lui-même et
gravé par Demarteau, 1767. 
Gravure en manière de crayon.
H. 0,420 x L. 0,325. –
L. Leymarie, n° 35.

Carle Vanloo (1705-1765), fils, frère, oncle et père de peintres célèbres, fut parmi ces artistes l'un de ceux qui ont eu le plus grand talent et la plus grande notoriété. Il s'est représenté, son porte-crayon à la main, à l'âge de quarante-cinq ans environ, car sur cette image il paraît sensiblement plus jeune que sur le tableau de famille peint en 1757 par Louis-Michel Vanloo. Le dessin est au Louvre.
Demarteau a su, en le gravant, conserver au modèle son air de bon et joyeux vivant. L'estampe est un des meilleurs portraits du temps, faits « en manière de crayon ».


Baigneuses.

Baigneuses.

Le lever du soleil

 Baigneuses.   
Étude de nu.

Gravé en manière de crayon par Gilles Demarteau.
Dimensions respectives: H. 0,229 x L. 0,183 (sans les traits d'encadrement) ;
H. 0,226 x L. 0,183 (sans les traits d'encadrement) ;
H. 0,337 x L. 0,494.
L. de Leymarie, n° 345, 346 et 53.

Les dessins de Boucher contribuèrent pour le moins autant que ses tableaux à sa popularité. Il était de bon air d'en avoir, et tout le monde en voulut. « Et comme Boucher était un homme heureux en toute chose, il arrivait, au beau milieu de cet engouement pour ses dessins, qu'un graveur trouvait un procédé pour les graver en manière de crayon: Demarteau, pas ses étonnants facsimilés, les faisait circuler dans toutes les mains » (E. et J. de Goncourt, l'Art du XVIIIe siècle.).
Comme c'est le cas à l'origine de toutes les inventions, deux artistes, le Nancéien François et le Liégeois, devenu Parisien, Gilles Demarteau, se disputèrent l'honneur d'avoir trouvé la gravure en manière de crayon. Il semble bien aujourd'hui que le véritable inventeur, ou plutôt le rénovateur, car le procédé était connu avant lui, fut François, à qui, du reste, le Marquis de Marigny fit de ce chef accorder une pension par le roi. Toutefois, Demarteau est incontestablement celui qui porta le procédé à son plus haut point de perfection et qui le vulgarisa par un œuvre considérable. Les deux planches représentant des Baigneuses sont de bons spécimens de ces œuvrettes agréables, mais souvent sans caractère, reproduites « en série » par Demarteau. La grande page de nu, gravée d'après un dessin de la collection Blondel d'Azincourt, est une étude pour les deux Naïades et le Triton que l'on voit au premier plan, à droite, dans le Lever du soleil, peinture exposée par Boucher au Salon de 1753, reproduite en tapisserie par les Gobelins et aujourd'hui conservée à la Galerie Wallace.
Nous donnons aussi deux « pendants » gravés de la même façon d'après Boucher par Louis-Marin Bonnet. Cet artiste prétendit aussi avoir inventé le procédé de gravure en manière de crayon; mais les premiers essais de François (1740) sont antérieurs à la naissance de Bonnet (1743), à qui l'on doit, par contre, la gravure en manière de pastel, dérivée de la manière de crayon.
Le même François avait trouvé un procédé de gravure au lavis; dont le Projet de plafond, d'après Boucher, est un spécimen, on peut dire, accompli, offrant en outre l'intérêt d'être daté par une inscription de l'artiste : Mars 1758, soit dix ans avant que J.-B. Le Prince, à son retour de Russie, inventât un procédé analogue.


 La Petite laitière.
Gravé en manière de crayon par Gilles Demarteau.
H. 0,204 X L.0, 296.
L. de Leymarie, n° 377.

D'après l'inscription de l'estampe, le dessin original J B Huet, de 1772.
De même qu'on a fait une place aux lavis de Le Prince, de même il faut choisir un échantillon de l'œuvre de Jean-Baptiste Huet. Lui aussi, il adonné dans la scène galante, tout paysagiste et animalier qu'il fût à l'origine: on en a pour preuve l'Amant écouté et l'Éventail cassé, pour ne citer que ces deux compositions popularisées par les estampes de Bonnet.
Mais n'est-ce pas surtout comme dessinateur qu'on lui accorde aujourd'hui quelque attention ? Et, parmi ses dessins, n'est-ce pas surtout à ceux gravés en manière de crayon par le grand spécialiste Demarteau, dont il fut, avec Boucher, le fournisseur de prédilection, qu'il doit le plus clair de sa renommée actuelle ? Par la toute puissance de son talent d'interprète, Demarteau a vraiment infusé une vigueur qui les sauve à ces études de nu, à ces pastorales, à ces scènes enfantines, si fades, si conventionnelles, si monotones; et c'est là un curieux exemple du secours efficace que peut apporter à des originaux adroitement traités, mais sans personnalité marquée, un procédé de traduction manié de main de maître.  

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