La gravure de l'Enseigne, annoncée au Mercure de France en mars et en juillet 1732 comme devant paraître prochainement, fut mise en vente au mois de novembre de la même année. C'est le chef-d’œuvre d'Aveline et l'une des planches les plus importantes de l'époque, tant par ses qualités que par ses dimensions (0,519 x 0,837). Elle a été exécutée d'après une copie de l'œuvre originale, légèrement modifiée et réduite aux dimensions de la gravure, copie due à Pater et aujourd'hui dans la collection Edgar Stern.
La peinture originale, faite par Watteau pour servir d'enseigne à la boutique de son ami Gersaint, marchand de tableaux sur le pont Notre-Dame, est postérieure au voyage du maître à Londres; on lui donne pour date la période comprise entre la mi-septembre et la fin de décembre 1720. Passée de chez Gersaint chez Claude Glucq, conseillé au Parlement, et de celui-ci chez son cousin Jean de Jullienne, l'ami de Watteau, acquise par le roi de Prusse Frédéric II entre 1744 et 1756, l'Enseigne est aujourd'hui à Berlin. Elle a été coupée en deux morceaux dès le XVIIIe siècle.
La gravure d'Aveline est digne de la beauté de ce précieux tableau, dans lequel Watteau, peu de mois avant de mourir, se révélait sous le jour nouveau d'un magistral peintre de mœurs. Elle nous rend, dans toute leur amusante et vivante diversité, les attitudes et les costumes des personnages qui animent cette boutique aux murs tapissés d'œuvres d'art, tous les détails pris sur le vif d'une scène entièrement recomposée et librement interprétée par le peintre.
Cette estampe fut mise en vente au mois de juillet 1732 (Mercure) ; Laurent Cars, dont elle est une des plus belles pièces, était alors âgé de 33 ans.
La peinture appartenait à Jullienne, qui la garda jusqu'à sa mort (1766). Elle est aujourd'hui à la Galerie nationale d'Écosse, à Édimbourg.
On s'est demandé si Watteau ne s'était pas inspiré, pour cette composition, du célèbre ballet de Danchet, musique de Campra, les Fêtes vénitiennes, représenté pour la première fois à l'Opéra le 17 juin 1710 et souvent repris par la suite. Il se peut; mais, s'il en est ainsi, la réminiscence est fort lointaine et à peine perceptible. Il ne faut pas oublier, du reste, que la plupart des tableaux de Watteau n'eurent pas de titres à l'origine: c'est seulement après la mort du maître, quand ces tableaux furent gravés, que l'on se préoccupa de leur trouver des titres pour pouvoir désigner commodément les estampes. Ces titres sont d'ordinaire fort imprécis; dans le cas contraire, comme pour Fêtes vénitiennes, pour les Champs-Élysées, par exemple, on ne saurait accepter sans réserve les indications qu'ils paraissent fournir.